Archives de catégorie : Psychologie

Le développement d’un TCA peut-il être la conséquence d’un traumatisme?

De nombreux auteurs s’accordent pour parler d’une étiologie (cause du trouble) multifactorielle. Différents facteurs de vulnérabilité ont été identifiés, tels que des facteurs génétiques et biologiques. Des problématiques d’attachement et du développement en lien avec l’environnement émotionnel et parfois des évènements traumatogènes, sont également mis en lumière. L’impact des aspects socio-culturels sur ces problématiques est aussi souligné. Les causes sont différentes pour chaque personne, il n’y a pas de règles. Un travail psychothérapeutique permet de démêler les interactions entre les différents facteurs à la base de l’émergence et du maintien des difficultés.

Dans certain cas, il semblerait que les troubles alimentaires puissent s’envisager comme une conduite dissociante (Salmona, 2008). C’est un comportement qui permet de « s’anesthésier » tant physiquement, émotionnellement que psychologiquement. Elle peut prendre de nombreuses formes  comme par exemple :

  • des prises de toxiques (drogue, alcool)
  • des conduites hétéro-agressives (violences conjugales, bagarres)
  • des conduites à risque et auto-agressives (auto-mutilations, mises en danger, anorexie et crises de boulimie).

Ces comportements sont mis en place de façon intuitives et inconscientes par les personnes ayant vécu un trauma. Ils ont pour objectifs de se déconnecter de la réalité, d’atténuer les manifestations douloureuses d’une mémoire traumatique.

La mémoire traumatique est un trouble de la mémoire émotionnelle implicite, c’est-à-dire non consciente, non verbalisable. C’est une conséquence traumatique liée à des mécanismes neuro-biologiques de sauvegarde de l’organisme. Depuis peu, des recherches scientifiques ont mis en évidence l’existence d’un circuit de la peur conditionnée qui serait sous-jacent aux mécanismes traumatiques et à la mémoire traumatique. Les manifestations de la mémoire traumatique se caractérisent par des pensées intrusives et désagréables liées au trauma, par des flash-back, des cauchemars, des douleurs somatiques, des bouffées d’angoisse… Bien que relatifs au trauma, ces symptômes ne sont pas toujours identifiables comme étant directement relatifs au trauma par la personne qui en souffre, ce qui les rends particulièrement pénibles et déstabilisants ; d’autant plus qu’ils peuvent être ressentis dans des situations anodines de la vie quotidienne.

Pour éviter l’activation de cette mémoire traumatique, les personnes concernées mettent en place des comportements d’évitements et d’hypervigilance afin de ne pas être confrontées à certains indices présents dans leur environnement (une odeur, un son, une parole, une sensation..) qui pourraient « réveiller » cette mémoire traumatique. Lorsque cela n’est plus suffisant, elle commence à faire l’expérience intuitive de l’ « efficacité » des conduites dissociantes qui ne sont que des solutions temporaires puisqu’elles augmentent la mémoire traumatique et induisent elles-mêmes une souffrance tant physique que psychologique.

Selon certains auteurs, les conduites de restriction et de boulimie pourraient donc parfois être comprises comme une tentative de réponses aux manifestations de la mémoire traumatique.

Les processus décrits dans cet article et la souffrance qu’ils génèrent doivent être traités dans un cadre psychothérapeutique. Il est important de les articuler à d’autres notions fondamentales dans la prise en charge des troubles alimentaires que sont le cycle « restriction-boulimie » et les troubles de l’image corporelle.

Caroline Duchi

Comment choisir une psychothérapie quand on souffre d’anorexie, de boulimie?

Comprendre que l’on souffre n’est pas mince affaire. Comprendre que l’on souffre d’un trouble alimentaire et que l’on ne peut pas s’en sortir seul est une étape. Faire la démarche pour une prise en charge est parfois douloureux et compliqué. Choisir un psychothérapeute devient un exploit!

Avant toute chose, il ne faut pas oublier qu’une psychothérapie seule pour traiter les troubles alimentaires N’EST PAS EFFICACE. Cette maladie nécessite une prise en charge pluridisciplinaire car il s’agit de maladies complexes qui touchent différentes sphères (alimentaire, psy, corporelle). Vous n’allez pas prendre uniquement un sirop pour votre gorge qui est irritée quand vous souffrez d’une grippe fiévreuse… Mais la psychothérapie est un aspect de la prise en charge, et nous allons tenter ici de vous aider à démêler quelques nœuds.

C’est quoi un « psy »?  Quel type de psychothérapie existe et laquelle choisir? et enfin comment et qui choisir?

Le « psy »

Sous ce terme se cache 3 praticiens : le psychiatre, le psychologue (clinicien) et le psychothérapeute. Ils ont pour objet d’étude l’être humain et ses souffrances.

Le psychiatre : Statut légal protégé, diplôme reconnu, 10 à 12 ans de formation. Il est un médecin spécialiste. Il peut diagnostiquer et traiter les maladies psychiatriques en utilisant la médecine. Pour cela, il peut prescrire des médicaments et il peut aussi effectuer une psychothérapie, s’il est psychiatre–psychothérapeute.

Le psychologue (clinicien) : Statut légal protégé, diplôme reconnu, 5 ans de formation. Il est un professionnel des sciences humaines. Il est spécialisé dans la compréhension du fonctionnement et de la dynamique psychique de la personne, ainsi que dans la psychopathologie. Pour cela il est formé à l’utilisation de l’entretien psychologique, et à l’utilisation et l’interprétation des tests psychologiques lors de bilans. Il peut aussi être psychothérapeute pour le traitement des pathologies psychiques.

Le psychothérapeute : Statut légal protégé, diplômes et formations variables. Il propose des prises en charge pour le développement et la connaissance de soi, ou pour les souffrances et maladies psychiques.

La psychothérapie

Différentes types de psychothérapies existent : la Psychanalyse (le plus souvent selon Jung, Freud ou Lacan), la Thérapie Rogerienne, la Gestalt Thérapie, les Thérapies Systémiques (familiales, stratégiques, brèves…), les TCC (Thérapies comportementales et cognitives), la Thérapie Transpersonnelle, la Thérapie Intégrative… Elles font référence à des théories différentes. Il s’agit alors des différents filtres de pensée et grilles d’analyse pour comprendre les dynamiques psychiques d’une personne. La façon de travailler sera donc différente.

Quel type de psychothérapie choisir pour les troubles alimentaires?

En fait, c’est à vous de choisir! Dans les sciences humaines, nous savons aujourd’hui qu’aucun des types de psychothérapie n’est plus efficace qu’un autre. C’est « l’alliance thérapeutique » qui est importante. Il s’agit de la collaboration mutuelle, le partenariat entre le patient et le thérapeute dans le but d’accomplir des objectifs fixés. Cette coopération et cet engagement sont les « critères » d’une bonne psychothérapie. Les outils ou la méthode sont en fait secondaires, tant que le thérapeute les maîtrise. Il faut donc vous demandez si la personnalité du psy et sa manière de comprendre et d’aborder vos difficultés vous convienne. Réponse de psy me direz-vous? En effet, je ne peux pas vous dire quel type de psychothérapie choisir, mais je peux vous dire de vous écouter vous. Essayez de rencontrer un psy près de chez vous, ou un psy qu’on vous a conseillé. Et si vous sentez que cela ne vous convient pas, dîtes lui. Les psys sont là aussi pour vous orienter et vous aider à aller voir ailleurs!

Mais une chose est très importante, choisissez aussi un psy qui est SPÉCIALISÉ DANS LES TROUBLES ALIMENTAIRES. Ces maladies sont très complexes, et il est nécessaire d’avoir un spécialiste qui vous suit, sinon il ne comprendra pas ce que vous lui racontez, ce que vous vivez… Au mieux il vous soutiendra, mais il ne vous aidera pas à guérir.

En résumé, trouver un psy dont la personnalité fonctionne avec la vôtre, quelque soit le type de psychothérapie qu’il pratique, et surtout qui est spécialisé dans les troubles du comportement alimentaire.

Ce qui vous sera très utile en parallèle de la psychothérapie ou en attendant de trouver le bon psy, c’est de lire. Informer vous au maximum sur les troubles alimentaires et sur le fonctionnement de votre anorexie, de votre boulimie ou de votre hyperphagie. La bonne psychothérapie commence par vous permettre de mieux comprendre les mécanismes de cette maladie qui vous fait souffrir pour mieux la combattre. Si vous ne connaissez pas ou si vous ne voyez pas votre ennemi, comment l’attaquer?

Aude Réhault (Psychologue Clinicienne – Psychothérapeute)

Anorexie mentale, boulimie et dépression chez l’adulte

Nous décidons ici d’écrire sur le lien entre la dépression et l’anorexie mentale, car nous entendons encore trop souvent que l’anorexie est une forme de dépression!

 

Il n’y a pas si longtemps, les personnes souffrant d’anorexie mentale étaient soignées par des endocrinologues parce qu’elles n’avaient pas leurs règles. Une large partie de la maladie n’était alors pas prise en charge… Les maladies psychiques ne doivent plus être traitées de façon symptomatique. Aujourd’hui et depuis peu, l’anorexie mentale est considérée comme une maladie en soit et non plus comme étant l’entrée dans autre chose. L’anorexie mentale n’est donc pas le symptôme d’une autre maladie comme l’hystérie, la psychose, un état limite ni même une dépression… Mais il s’agit d’un syndrome à part entière, trouvant son origine dans les mécanismes de l’adolescence. Ce symptôme prend naissance durant l’adolescence mais l’apparition de la symptomatologie franche, ou la prise en compte des symptômes, ou la sortie du déni peut se faire plus tardivement. Ce qui explique un début soit disant tardif de la maladie.

L’anorexie mentale n’est donc pas un symptôme d’une dépression, ni même une dépression. Il n’est pas interdit de penser qu’au décours d’un TCA puisse apparaître une authentique dépression, mais cela est autre chose.

  • Une preuve thérapeutique : les antidépresseurs ne sont pas efficaces sur l’anorexie mentale. Quand on guérit une anorexique de sa maladie et qu’elle souffre aussi d’un état dépressif, celui-ci ne reste pas. L’état dépressif est donc soit secondaire à l’anorexie mentale (il est une conséquence) ; soit il n’a rien à voir avec l’anorexie mentale et la dépression s’est installée de manière indépendante.

 

  • Le suicide anorexique ne ressemble en rien aux suicides des personnes souffrant d’une dépression. Il est brutal, il a toujours une cause dans la réalité, après une boulimie par exemple… Il n’y a pas de préméditation, pas forcément de lettre laissée pour les proches, aucun prodrome ou signe avant coureur n’est repérable. C’est pour cela qu’il y a une telle quantité de suicides de personnes souffrant d’anorexie mentale : on ne le voit pas franchement venir.
  • Lors des enregistrements polysomnographiques (enregistrement durant le sommeil des variables physiologiques comme la respiration, le rythme cardiaque, les tensions musculaires…), il y a une preuve irréfutable de la dépression ; lorsque l’on pratique ce type d’enregistrement sur des personnes souffrant d’anorexie mentale, il n’y a aucune des caractéristiques de la dépression.

Maintenant, comparons les signes cliniques de la dépression avec ceux de l’anorexie mentale :

 

  Anorexie Mentale Dépression
Âge de déclenchement À l’adolescence. Vers 20-25 ans.
Cycle de l’humeur Absence. Il n’y a jamais vraiment de changement d’humeur (dans le sens clinique du terme) entre restriction et boulimie. Présence.
Restriction La restriction est un mode d’être au monde, une façon de contrôler ce qui est incontrôlable. Quelque part il y a un intérêt de ne pas manger. (Se) Forcer à manger ne sert à rien, les mécanismes qui sous tendent la restriction sont profonds et ont une utilité dans le fonctionnement psychique de la personne. La sensation de faim disparaît et la restriction devient un abandon : il y a un désintérêt pour tout, notamment pour le fait de s’alimenter. Forcer la personne à manger devient possible car ne va pas mettre en danger l’équilibre psychique de celle-ci.
Boulimie La boulimie est la conséquence de la restriction. Le corps et l’esprit ne tiennent plus dans ce mécanisme qui utilise trop d’énergie psychique et physiologique, et laisse place à des compulsions qui engendrent ensuite honte et culpabilité. La restriction engendre une boulimie, et une boulimie engendre une restriction. La boulimie peut advenir. Tout comme l’anorexie, il s’agit d’une sorte d’abandon. La boulimie est une tentative de régulation de la souffrance et des affects dépressifs. Mais elle ne s’accompagne pas d’une honte ou d’une culpabilité, et la restriction par compensation pour contrôler l’aspect corporel ne s’applique pas non plus.
Amaigrissement Il s’agit d’une perte de poids très importante en très peu de temps. L’amaigrissement est moins important, moins fulgurant.
Trouble de l’image corporelle Présence. Ce trouble est constitutif de la maladie. Il est aussi parfois à l’origine des rechutes. Absence. On a rarement vu une personne souffrant de dépression avoir un trouble de l’image corporelle.
Trouble cognitif Absence. Les personnes souffrant d’anorexie mentale sont douées professionnellement ou scolairement. Lorsqu’elle ne le sont plus, c’est la conséquence de la dénutrition ou de la durée dans la maladie. Présence. Il s’agit d’un des symptômes.
Tristesse et perte de l’élan vitale La tristesse n’est pas constante et est la conséquence de ce qui est vécu au quotidien comme souffrance liée à la boulimie, au rejet et l’incompréhension des proches… L’élan vitale est maintenue, avec une envie de vivre très importante qui parfois disparaît lorsque le désespoir de s’en sortir apparaît (dû à l’incompréhension de la maladie et de la façon d’en guérir, le refus et le rejet d’accès au soin par les praticiens « censé savoir et aider »…) Tristesse constante, avec perte de l’élan vitale. L’envie de vivre est diminuée et la motivation ou l’énergie pour bouger disparaît.
Processus psychiques Tachypsychie. C’est à dire une accélération anormale des processus psychiques, qui génère une certaine excitation. Bradypsychie. C’est à dire un ralentissement des processus psychiques.

 

 

Dr Alain Meunier (Psychiatre – Psychanalyste)

Aude Réhault (Psychologue Clinicienne – Psychothérapeute)

Hypnose

L’hypnose, qu’est-ce que c’est?

L’hypnose est souvent méconnue, parfois associée à la magie, au spectacle, au charlatanisme, ou à la manipulation… Toutes ces idées reçues peuvent s’expliquer par l’histoire de l’hypnose, mais nous ne reviendrons pas sur ce long et tumultueux parcours ici!

L’hypnose est un état modifié de conscience. C’est un état naturel, survenant spontanément au quotidien.

Souvenez-vous… Une réunion soporifique, un trajet interminable, un cours ennuyeux… A partir d’un certain moment, votre attention va se dissiper, votre vue peut se brouiller, et vous partez dans vos pensées. Voilà un état hypnotique.

Souvenez-vous… Pendant la lecture de votre thriller préféré, durant le film de l’année, l’œuvre d’art qui vous transporte… Vous sortez petit à petit du réel pour vous retrouvez dans votre bulle, au calme, avec ce qui vous passionne… Au point peut être de ne plus entendre quand on vous appelle! Voilà encore un état hypnotique.

Ainsi, l’hypnose est un procédé permettant à chacun d’entre nous de se dissocier afin de s’échapper parfois de la réalité, pour voyager dans notre imaginaire.

Finalement rien d’incroyable, nous avons tous cette capacité innée!

L’hypnose, à quoi ça sert?

L’hypnose peut être utilisée en thérapie. Il s’agit alors d’un mode de fonctionnement psychique par lequel le sujet, en relation avec le praticien, va pouvoir faire l’expérience d’un champ de conscience élargie. Le sujet reste toujours conscient. Il ne pourra jamais être forcé à faire quelque chose qu’il ne veut pas faire, justement parce que l’on reste conscient en état hypnotique…

C’est un outil qui est utilisé pour développer les ressources internes de la personne en souffrance. C’est aussi l’apprentissage du lâcher-prise, sans perdre totalement le contrôle.

 

Hypnose en thérapie dans les troubles du comportement alimentaire

L’hypnothérapie peut ainsi être utilisée dans la prise en charge des Troubles du Comportement Alimentaire (anorexie, boulimie, hyperphagie).

L’hypnose ne soigne pas seule les TCA ! Elle constitue néanmoins une aide dans la prise en charge psychothérapeutique de ces troubles. Il s’agit en effet de développer les capacités de lâcher prise, une meilleure gestion de l’angoisse et des émotions… Voici une liste d’hypnothérapeutes formés à l’hypnose (vérifier au préalable s’il est spécialisé dans les troubles alimentaires) : http://www.hypnose.fr/adresses_therapeutes_hypnose.htm

Loin de la vision stigmatisée de l’hypnose, celle-ci n’est pas que magie ou mentalisme, mais constitue un atout thérapeutique certain et démontré.

Aude Réhault

Un Docteur intéressant qui défend une approche humaine!

Parlons des êtres humains à aider plutôt que des anorexiques à gaver…

Je souhaitais partager un petit article qui parle d’un psychologue Québécois, le Dr Jean Wilkins, qui soigne depuis plusieurs dizaines d’années des adolescents souffrant d’anorexie mentale au CHU Sainte Justine de Montréal. Le discours de cet homme est intéressant, car il prône une « approche clinique humaine » qui semble parfois manquer dans certaines structures de soin. Il parle d’individu et d’approche individualisée dans sa pratique, et met en garde sur une prise de poids trop importante et agressive.

Ce type de discours me paraît suffisamment manquant ou tout au moins important à rappeler, pour le signaler ici. Je n’ai pas encore lu son livre : « Adolescents anorexiques, plaidoyer pour une approche clinique humaine » ; mais ses écrits ou interviews que vous pouvez retrouver, entre autre, sur le site de l’association ANEB (association canadienne des troubles du comportement alimentaire) amènent une vraie bouffée d’air pur avec cette humanité dans son discours… Enfin quelqu’un qui parle d’être humain!

 

http://www.techno-science.net/?onglet=news&news=10162

 

Aude Réhault

Anorexie mentale chez l’adulte et chez l’adolescent

L’anorexie mentale se déclare le plus souvent à l’adolescence. C’est peut être pour cela que ces jeunes femmes souffrant d’anorexie mentale sont plus exposées que celles plus âgées.

S’agit-il du même type d’anorexie?

Lorsque l’anorexie se déclenche après l’adolescence, il peut s’agir non pas d’une anorexie mentale, mais d’une anorexie en tant que symptôme d’autre chose, comme une dépression par exemple. Dans ce cas là on ne retrouve pas tous les traits du « mental anorexique » ; l’anorexie, la restriction alimentaire, est alors associée à une perte de l’appétit liée à l’état dépressif.

Cependant, l’anorexie mentale peut survenir après l’adolescence, et la maladie se définit de la même manière dans les deux cas. Mais cela n’arrive pas du jour au lendemain. L’anorexie mentale reste une maladie qui est liée à l’adolescence. En effet, c’est durant cette étape du développement du psychisme humain que la maladie s’installe, là où il y a une souffrance, une fragilité. Elle vient se positionner à ce moment et construire une sorte d’armure, de protection autour de la personnalité pour empêcher toute agression. Mais l’intensité des symptômes, en particulier alimentaires, n’est pas forcément très forte, et c’est pour cela que parfois l’on ne ressent ou ne voit rien d’anormal à cet âge. C’est plus tard, peut être face à une difficulté importante ou suite à une accumulation d’épreuves que les symptômes peuvent s’intensifier et devenir visibles ou engendrer une souffrance.

Ceci rappelle bien que l’anorexie mentale n’est pas qu’une difficulté alimentaire! La sélection d’aliments, la restriction importante, les conduites alimentaires aberrantes ne sont que la partie visible de l’iceberg, c’est pourquoi parfois ils peuvent être très discrets et n’apparaître que bien plus tard. Ou alors c’est l’aménorrhée qui devient problématique lorsque la femme cherche à avoir des enfants, et c’est à ce moment que la recherche diagnostic se fait…

Cela se soigne-t-il de la même manière?

Il s’agit de la même chose, donc les directions du soins sont identiques : prise en charge pluridisciplinaire avec un psy, un nutritionniste ou une diététicienne, une psychomotricienne ou un thérapeute corporel. Mais il s’agit quoiqu’il en soit d’adapter les prises en charge en fonction de chaque personne, de là où elle en est, de l’intensité des symptômes, et de ce qu’elle souhaite modifier.

Structures de soin

Aude Réhault

Anorexie mentale : maladie des sociétés modernes?

Une question qui revient souvent… Elle sous-entend : notre société moderne et occidentale crée-t-elle cette maladie?

A force de voir ces photos de magazines où les personnes exposées sont maigres, certains se demandent si ce phénomène n’influencerait pas les jeunes filles dans un devenir anorexique.

Un argument pour :

L’anorexie mentale est multifactorielle. C’est-à-dire qu’il y a en fait plusieurs causes et origines. On parle aujourd’hui de cause biologique, psychologique et sociale. Mais ces causes ne sont pas clairement et précisément définies.

L’influence sociale importante mais pas unique, peut se voir en particulier depuis les années 80. Dans ce nouveau modèle féminin nous pouvons en effet retrouver des caractéristiques voire des symptômes de l’anorexie mentale :

  • Perfectionnisme et contrôle/ la femme doit être un modèle, une femme parfaite au foyer avec ou sans enfants, carriériste, avec une vie sociale riche.
  • Contrôle du poids / une taille et un poids idéal qui se situe si possible dans la maigreur.
  • Hyperactivité physique / le corps de la femme doit être sec et musclé : les belles années de l’aerobic!
  • Hyperactivité intellectuelle / si elle n’est pas à un haut poste, la femme doit être active, engagée.
  • Contrôle alimentaire / il faut manger sain, la diététique entre dans tout les foyer.

Cette influence sociale exerce alors une sorte de pression. Mais loin d’être à l’origine de tout, c’est aussi dans l’autre sens qu’il faut penser les choses : la mode se calquerait à l’anorexie mentale. Et n’oublions pas qu’il s’agit d’une MALADIE et non d’un phénomène de mode.

Arguments contre :

Des descriptions de l’anorexie mentale sont faites dès l’Antiquité. Donc elle existe depuis longtemps, ce n’est pas une maladie uniquement moderne. C’est la définition officielle et médicale du trouble qui est relativement récente.

L’anorexie mentale existe dans des pays avec une culture différente. Il existe des personnes qui souffrent d’anorexie mentale en Afrique, en Asie. Il ne s’agit donc pas d’une maladie uniquement liée à notre société occidentale.

Cela permet aussi de montrer qu’il ne s’agit pas d’un « caprice » comme certains le prétendent ou le sous-entendent. ce n’est pas non plus lié à la société de consommation : ce n’est pas un rejet de la surproduction ou de la surconsommation.

L’anorexie mentale existe depuis longtemps et n’est pas entièrement dépendante ni créée par la société occidentale moderne.

Aude Réhault