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Les pouvoirs du cerveau dans la guérison d’un TCA

Quelques lignes pour faire le lien entre les soins aux TCA et les pouvoirs de guérison du cerveau évoqués dans l’ouvrage de Norman Doidge

Comment le cerveau fonctionne-t-il ? Qu’est-ce que la plasticité cérébrale ?

Si une activité est répétée, les liaisons entre neurones qui s’y rapportent s’intensifient et nous rendent plus efficaces alors qu’à l’inverse, cesser de pratiquer une activité sur une période assez longue affaiblit ces connexions neuronales : ce principe ouvre de nombreuses pistes de soin !

Comment soigner à partir de ce principe de neuroplasticité ?

Par exemple, en « détruisant des connexions nuisibles » selon l’expression de N. Doidge, comme celles liées aux comportements boulimiques associés à des émotions particulières.

Ce psychiatre américain prend justement l’exemple d’ «une personne qui éprouve le besoin de manger chaque fois qu’elle se sent perturbée émotionnellement. Parce qu’elle a associé nourriture et diminution de la douleur psychique, il lui faudra apprendre à les dissocier si elle veut se débarrasser de cette habitude*.» Mais là, cette dissociation pourra s’appuyer et même se pérenniser par la neuroplasticité, avec l’affaiblissement progressif des connexions nuisibles et le renforcement des nouvelles connexions positives, celles des comportements qui viennent peu à peu remplacer les crises de boulimie.

Une autre piste de soin pour changer la perception de son corps :

« La carte cérébrale « d’exploitation  » de notre image corporelle est le produit de la combinaison de multiples cartes : les premières cartes biologiques fondées sur les données sensorielles de notre corps et les cartes créées de toutes pièces à partir de notre reflet dans le miroir, d’une jolie photo de nous-même, voire d’une image médicale comme une radiographie… tout ce qui peut être considéré comme une représentation de soi finit par se tracer un chemin dans la carte d’exploitation du corps imaginaire »* A fortiori, toutes les activités corporelles, sports et activités dites de conscience corporelle (yoga, Taï chi chuan…) apportent de multiples informations sensorielles qui contribuent à remodeler cette image de soi mentale et réduire ainsi la distorsion entre perception du corps et réalité.

Ces pistes se retrouvent au cœur du soin en psychomotricité face aux TCA !

En effet, le soin en psychomotricité propose toutes sortes de médiations corporelles qui vont :

– contribuer à nourrir le cerveau en informations sensorielles participant à la représentation du corps et ainsi aider à sortir de la dysmorphophobie**,

– proposer des outils corporels adaptés à chaque personne pour répondre aux émotions autrement que par l’aliment, des exercices qui viennent construire par la répétition de nouveaux circuits cérébraux qui ne soient plus nuisibles…

* Extraits de Guérir grâce à la neuroplasticité

**Trouble de la perception du corps (Cf. https://association-lanotebleue.fr/les-troubles-de-la-perception-du-corps-petite-explication/)

Blanche Augarde-Dollé

Psychomotricienne

L’ère de la psychiatrie s’étend à la neurologie!

Nous savons aujourd’hui grâce à la neuro-imagerie que le cortex préfontal dorsolatéral (DLPFC) bénéficie d’un rôle clé dans l’élaboration des fonctions exécutives (planification, organisation, élaboration de stratégies…) et que cette zone est impliquée dans certains troubles psychiatriques. La rTMS (stimulation magnétique transcrânienne à répétition) vient répondre à cette problématique en émettant un champs magnétique sur cette zone du cerveau afin de modifier l’activité électriques des neurones (pour en savoir plus sur la technique, cliquez ici ).

Si la rTMS est aujourd’hui reconnue comme un traitement pour la dépression de seconde intention aux Etats-Unis, elle a également montré une efficacité dans les troubles des comportements alimentaires.

Aussi, le nombre d’études impliquant la rTMS et les troubles du comportement alimentaire ne cesse d’augmenter depuis les années 2000. Et pour cause, les troubles du comportement alimentaire touchent jusqu’à 3 % de la population française et de nombreux traitements et thérapies restent inefficaces. L’exemple de l’étude de McClelland en 2016 est une réussite. Elle prédit qu’une séance de rTMS permet de réduire de manière convaincante les symptômes de l’anorexie (diminution de la sensation d’être gros, de l’urgence de se restreindre) et améliore les prises de décisions prudente en augmentant le contrôle cognitif par rapport à un groupe placebo n’ayant pas bénéficié de rTMS.

A notre échelle, au Centre SOS-Anor, une étude réalisée en 2017 a montré que sur 26 patients souffrant de boulimie, la SMT a eu un effet (très important chez 25 à 30 % et important chez 30 %) sur le nombre de crise de boulimie, sur le sommeil, sur les ruminations alimentaires et sur l’anxiété.

C’est encourageant !

Myriam Cordelle, Psychologue Clinicienne

Journée mondiale de sensibilisation aux troubles alimentaires

Les troubles du comportement alimentaire dérangent, sont incompris, mal diagnostiqués, mal soignés, complexes, meurtriers… Mais on en guérit! Aujourd’hui est la journée mondiale de sensibilisation aux troubles alimentaires.

Partagez pour informer, permettre l’ouverture d’un dialogue, de sortir de l’isolement, d’accentuer la compréhension et de sortir des préjugés encore trop nombreux…

Voici les 9 vérités soutenues par la Journée mondiale de sensibilisation aux troubles alimentaires :

 

Et voici les 9 objectifs de la Journée mondiale de sensibilisation aux troubles alimentaires :

Dalida et l’anorexie mentale…

« Quand elle était petite, elle était différente. Le regard des autres sur elle a toujours été important. Dalida n’est pas n’importe quelle femme » (extrait de la bande-annonce du film Dalida).

Il y a quelques jours, je suis allée voir le film Dalida au cinéma, et j’ai été submergée par l’émotion durant quasiment toute la projection. Au début, je me disais « tiens c’est bizarre, elle a des comportements d’anorexiques… », et puis j’ai laissé ce commentaire dans un coin de ma tête pour profiter du film. Cependant, plus ça allait, plus je voyais Dalida, dont je ne connaissais pas la vie, comme une anorexique, c’était flagrant. Je la comprenais à 100% dans sa recherche de l’Amour, dans sa quête du bonheur, dans sa relation avec les autres, dans sa dévotion, et dans sa passion. Vint le moment où Dalida se fait vomir à plusieurs répétitions, et là c’était clair pour moi : elle était bel et bien atteinte d’anorexie mentale. A un moment, on voit bien Dalida amaigrit, refusant de s’alimenter, fatiguée et lasse. Plus le film passait, plus j’étais transpercée par cette découverte, et plus je ressentais de la compassion pour cette belle personne. Le tout ponctué d’un très beau jeu d’actrice et de musiques toutes plus émouvantes les unes que les autres. J’ai pleuré plusieurs fois pendant le film et surtout après, en sortant de la salle où j’ai déversé un torrent de larmes ! J’avais l’impression de connaître la vie de Dalida bien plus que tous les autres spectateurs qui venaient de visionner le film, j’avais envie de dire à tout le monde « ne vous rendez-vous pas compte quelle était anorexique ? ».

Plusieurs éléments m’ont mis la puce à l’oreille. Tout d’abord, l’enfance de Dalida, avec plusieurs traumatismes sociaux (humiliations à l’école, rejet de ses camarades, mauvaise intégration), et familiaux (arrestation de son père dont on l’a privée, père violent envers la maman, etc.). Dalida, qui n’avait déjà pas confiance en elle et qui avait peur du regard des autres, a ainsi reçu une image choquante de la relation Homme-Femme au sens large. Elle n’a pas reçu tout l’amour de son père dont elle avait besoin et elle s’est retrouvée confronté à des « problèmes de couple » graves déformant ainsi sa vision de la vie amoureuse.

J’ai surtout beaucoup ressenti le manque d’amour et la solitude dont Dalida souffre. Elle excelle dans son domaine, elle a « tout » pour elle, elle est idolâtrée, elle est belle, et elle est intelligente. Tout pour être heureuse, me direz-vous. Malgré cela, on perçoit tout de suite l’immense vide intérieur auquel elle est confrontée. Oui, Dalida excelle, oui Dalida a d’immenses qualités professionnelles et personnelles, mais Dalida aspire à autre chose. Quelque chose de plus grand, de plus profond, de plus « léger », et de plus humain. Je perçois là une recherche de spiritualité, une quête de sens, une volonté de se « verticaliser » pour aller chercher des réponses à ses questions. C’est aussi pour moi, une opposition entre la Terre, ce « bas monde » dans lequel une partie d’elle est reconnue, et à l’inverse, le haut, le divin, l’Eternel, l’Absolu dans lequel elle aimerait se révéler. On pourrait y voir là, l’ambivalence bien connue des anorexiques. Les deux personnalités qui ont du mal à s’accepter, à vivre en harmonie. Dans l’esprit de l’anorexique, il n’y a de la place que pour une seule personne, ainsi l’une des deux combat l’autre. Dans le film, c’est l’opposition entre Dalida la chanteuse talentueuse, « parfaite » dont on parle, et Yolanda la femme, humaine, sensible, qui n’a pas confiance en elle, qui se cache et qui est évincée du devant de la scène.

Le rapport à la féminité est également bien mis en avant avec le grand désir de Dalida de faire des enfants et son immense amour pour eux. Le fait qu’elle ne puisse pas en avoir est un élément supplémentaire qui a aggravé son anorexie mentale. Car dans ce monde superficiel et plein de paillettes, en quoi la vie vaut-elle la peine d’être vécue si on ne peut pas la donner ? Si on ne peut pas la partager ?

D’autres signes très évocateurs étaient présents comme son hyperactivité et son contrôle. Dalida n’arrêtait pas, enchainait les tournées, les plateaux de télévision, les voyages dans le monde ; elle s’est même mise à danser sur scène pour suivre la mode de l’époque et devait ainsi répéter sans cesse. De plus en plus marquée par les éléments tragiques de sa vie, on assiste à un enfermement de Dalida. Elle s’enfermait dans son métier pour ne pas penser au reste, c’était sa coquille, sa carapace, afin de se sentir protégée de l’extérieur, de ses éventuelles agressions.

J’ai été plus que surprise en voyant se film, car j’ai ressenti une connexion très forte entre le personnage de Dalida et moi qui ai également connu l’anorexie mentale. C’est comme si j’avais pu lire en elle son mal-être, comme si je le comprenais. J’avais l’impression que son entourage proche ne la voyait que comme une femme fragile et vulnérable qu’il fallait prendre avec des pincettes, mais j’ai surtout vu en elle sa force intérieur, son envie de donner du sens, son envie de partager sa vie (avec un homme, avec un enfant, avec son public, avec le monde extérieur), et son envie d’exister.

Dalida n’était pas folle ni malade au sens médical du terme, elle était « malade d’amour » comme elle le chante si bien dans « Je suis malade ». Cette chanson est une déclaration d’amour très puissante. Elle a tellement d’amour a donner, qu’elle en souffre, et c’est ce que j’appelle la passion. Comme toutes les anorexiques, c’était une personne aimant « à la folie », qui croyait du plus profond de son âme en l’Amour mais qui n’a pas réussi à trouver sa place dans un monde qui pourtant l’acceptait tout entière. Mes larmes ont largement coulé lors de l’interprétation de cette chanson parce que j’ai trouvé magnifique le fait de pouvoir chanter haut et fort, debout devant le monde entier, cet immense besoin d’amour. Elle assume le fait d’être complètement perdue, et ceci est pour moi une demande à l’aide, très explicite. A bon entendeur…

La réalisatrice du film a prononcé ces mots sur le plateau de Michel Drucker : (Dalida était) « une femme à la recherche du bonheur, tournée vers l’extérieur. Elle s’est oubliée, elle a cherché l’amour à l’extérieur ». Après avoir fait des recherches sur Dalida, je n’ai pas trouvé de mention qui parle d’une éventuelle anorexie mentale, mais cette phrase n’a fait que renforcer mon sentiment par rapport à la chanteuse.

Ceci est pour moi le début de la compréhension de notre chère anorexie.

Et-vous, qu’en avez-vous pensé ?

Emmanuelle

World Eating Disorders Action Day

Aujourd’hui est un grand jour! C’est la 1ère journée mondiale consacrées aux Troubles du Comportement Alimentaire. Ce sont nos amis nords-américains qui ont lancé cette initiative afin de développer les connaissances sur ces troubles ainsi que leur traitement. Cette journée de mobilisation donne un grand espoir pour la suite, afin que les personnes qui souffrent de troubles du comportement alimentaire puissent être mieux soutenues, comprises et accompagnées dans le soin, sans oublier leurs proches. N’hésitez pas à partager afin de participer à une meilleure compréhension par le public!

Afficher l'image d'origineWorld Eating Disorders Action Day

 

 

 

Petite vidéo de l’équipe de La Note Bleue : LNB_WEDAD_H264

Et pour la petite histoire, Keanu Reeves et toute l’équipe du film (actuellement en post production) « To the Bone », se sont aussi mobilisées pour cette journée. On attend la sortie du film !

 

My Skinny Sister : la voix de la culpabilité

My Skinny SIster - Sanna Lenken

« Je me suis rendue compte en en parlant qu’il était important de partager votre point de vue »

Voilà ce que m’a répondu Aude Réhault après que je lui ai envoyé mes retours suite au visionnage de « My Skinny Sister ». Lui ayant exprimé l’intention d’aller voir le film, elle m’avait encouragé à rédiger un billet pour le site. Plus qu’une simple critique, j’ose donc aujourd’hui vous présenter mon témoignage et mes réflexions.

 

 

 

En préambule, je souhaiterai me présenter :

J’ai 27 ans. Je souffre de Troubles du Comportement Alimentaire depuis l’âge de 16 ans environ. Anorexie restrictive dans un premier temps, dont j’ai pris conscience vers l’âge de 19 ans après un burn-out. J’ai cru en être guérie suite à un traitement anti-dépressif puis de grands changements dans ma vie (réorientation et déménagement). Je sentais que ma relation à la nourriture n’était pas tout à fait apaisée, mais je faisais confiance à l’expérience et j’espérais qu’avec le temps je finirai par trouver de nouveaux repères par moi-même. Mais sans suivi et vivant seule, ces repères n’étaient pas bien solides et restaient très intellectuels. Les crises sont alors apparues. Puis la découverte du vomissement.

En 2012 (j’avais alors 23-24 ans), j’avais mis le doigt dans l’engrenage infernal : crises avec vomissements / restriction / crises avec vomissements. Réalisant que je m’enfonçais dans un système mortifère dont je ne voyais plus les possibilités de sortir, j’ai contacté le centre SOS Anor. J’ai alors rencontré le Dr Meunier, Aude Réhault, Fazia Khanifi et leur réseau d’âmes bienveillantes. Rue de Seine, j’ai trouvé un lieu où on me comprenait et où j’ai pu me débarrasser progressivement de la honte qui m’empêchait d’avancer vers la vraie guérison : celle du cœur et de l’esprit. Car l’on n’est pas anorexique et/ou boulimique par essence ou parce qu’on a « chopé » une maladie comme on attrape une grippe.

Mais on fait des crises ou on s’impose un régime de fer parce qu’on a mal à la vie, parce que notre rapport au monde s’est faussé et qu’on s’est perdu dans la bataille. Je suis toujours suivie aujourd’hui, j’ai encore des difficultés avec la nourriture (mais j’entends Nourriture au sens large car j’ai compris que la relation avec mon assiette était le reflet de celle que j’ai avec le monde qui m’entoure) mais j’ai de belles victoires sur lesquelles m’appuyer et je prends aujourd’hui grand plaisir à découvrir quel individu je vais pouvoir être sans ces béquilles tordues que sont les TCA.

Ce préambule pour exposer qu’aujourd’hui le comportemental, même s’il est le plus tangible et le plus handicapant au quotidien, n’est plus ma considération première et qu’en réaction je ne supporte plus qu’on réduise l’anorexie et/ou la boulimie à celui-ci (Il s’entend néanmoins que dans les phases où le pronostic vital se trouve engagé, il est important de replacer l’équilibre alimentaire comme priorité). C’est la voix qu’a commencé à faire entendre SOS ANOR et celle que j’aimerais qui soit entendue par tous.

 

Aussi, lorsqu’est sorti « My Skinny Sister », qui plus est réalisé par une jeune femme ayant souffert de troubles du comportement alimentaire, j’espérais qu’enfin serait présenté au grand public un témoignage sensible, dépassant le voyeurisme habituel envers ces comportements « étranges » et préférant révéler le pourquoi de leur nécessité. J’ai été profondément déçue et le visionnage de ce film m’a été très douloureux. J’avais déjà compris à la lecture du synopsis et après visionnage de la bande annonce que le point de vue adopté ne serait pas celui de la jeune fille atteinte de TCA mais de sa petite sœur. Cinéphile et jeune professionnelle dans le cinéma, je reconnais qu’il est très difficile de mettre la caméra « à l’intérieur » lorsque l’on veut aborder de tels sujets et surtout les rendre accessibles (je ne peux cependant m’empêcher de citer en contre-exemple « Clean, Shaven » de Lodge Kerrigan qui pour moi est un film magistral, sachant user de la merveilleuse palette cinématographique pour représenter la schizophrénie). Ceci dit, j’espérais que le lien fraternel, qui plus est apparemment bienveillant, permettrait d’amener la grande sœur à la confidence et ainsi de donner les éléments de compréhension nécessaires au public sur le pourquoi de ces comportements anormaux.

Or, rien de tout cela… On suit donc la petite Stella, tout en contraste (à mon goût très caricatural) de sa grande sœur. Très rapidement, elle perçoit des comportements étranges chez cette dernière (pas de préambule, la grande sœur est directement définie par ceux-ci) et ce lors de scènes malheureusement très rapides.

L’anorexie n’est donc encore une fois montrée que par ses symptômes alertants que l’on peut trouver sur tous les sites d’information aux familles (ce qui en fait néanmoins un bon film de sensibilisation). Mais rien qui ne nous fasse entendre, pour inviter à la comprendre, la souffrance intérieure de la jeune adolescente. Celle-ci écope d’un rôle bien noir : elle est dure, méchante, et on en vient rapidement à penser « folle » voire « monstrueuse ». Ce mot « MONSTRE » m’est venu plusieurs fois à l’esprit. Car c’est ainsi qu’elle est parfois mise en scène, à grand coup de regards noirs, d’agitation malsaine et de musique bien dramatique. Tout cela vu par les yeux de cette pauvre petite sœur toute mimi de laquelle elle vampirise l’innocence. Tout comme l’espace familial qui, une fois la maladie dénoncée, se voit asphyxié par l’aura malsaine que cette grande sœur dégage. Et toute l’attention des parents sera portée à la malade, laissant notre petite héroïne Stella de côté.

Les larmes me sont donc facilement venues, culpabilité et honte étant bien sévèrement remuées. Comment ne pas retrouver la vieille culpabilité d’en avoir fait baver à ma famille ? Comment ne pas renouer avec ma conviction d’être toxique pour les autres ?  Heureusement, ma connaissance du métier et mon habitude à analyser les films me permettent de prendre de la distance. De reconnaître ce qui relève du discours (point de vue, raccourcis, mise en scène) et ce qui relève du sujet (oui, c’est une maladie qui amène à des comportements anormaux). Mais je suis en colère. En colère qu’on m’ait mise dans cette situation de jugement sévère sur la maladie et surtout qu’on n’ait proposé que ce point de vue au spectateur. Le film serait sous-titré “comment les caprices d’une adolescente peuvent bousiller votre famille” que ça ne serait pas incohérent.

Or, si le film avait eu le goût des larmes ravalées, l’esthétique de la confiture mentale qui nous envahit, le son brouillé de ce monde qui nous entoure et nous semble loin et étranger, peut-être aurions nous pu un peu avancer dans la transmission sur ce qu’est réellement cette maladie.

Sur le coup de l’émotion, j’ai été tentée de sortir du placard pour lancer un grand appel à mes amis cinéastes pour qu’ils s’emparent du sujet. Puis je me suis laissée le temps de digérer. J’ai alors commencé à fouiller dans l’histoire du cinéma et de la télévision pour voir ce qui avait été déjà fait sur le sujet, cherchant le bijou à sortir des archives et qui me motiverait peut-être à organiser des projections-débats pour faire entendre nos voix.

 

Bon, ces séances n’étant pas des plus agréables, je n’ai pour l’instant vu que : (disponibles sur youtube en VO)

The Best Little Girl in the World (1981) qui, s’étalant des dérives vers la maladie jusqu’aux débuts de la guérison amène l’héroïne à exprimer son malaise intérieur (mais assez sporadiquement, il faut guetter les phrases 😉

Le Choix d’une vie / Hunger Point (2003) attention assez difficile à voir, mais le personnage de la sœur est très intéressant, puisque par empathie elle cherche, et ce avec beaucoup de finesse, à comprendre le trouble de sa sœur.

Thin (documentaire, 2006) intéressant, mais le décor étant un centre de soins assez strict pour patientes aux pronostics vitaux engagés, il s’agit plutôt d’une alternance de scènes de répression et de rébellion. Le point de vue n’étant pas clair, c’est à nous d’aller y chercher les quelques bribes d’espoir bien cachées sous des comportements à vifs.

Et vous ? Avez vous vu un film qui vous a frappé par sa pertinence et qui vous aiderait à communiquer sur ce que vous vivez / avez vécu ? Attention, si vous avez aussi l’intention de visionner de nouveaux films sur le sujet, je me permets de dire que ce n’est pas un exercice facile. Ca remue beaucoup. Mais il faut toujours bien garder en tête que c’est un discours, un point de vue qui n’est peut être pas le vôtre. Et surtout, parlez-en…

Sur ce, je vous souhaite à tous espoir, courage et beaucoup d’amour.

Que 2016 vous soit tendre et bienveillante.

 

Bien à vous,

 

SB

L’image du corps altérée lors de Trouble du Comportement Alimentaire

 

  • Perception du corps altérée

La perception du corps est altérée. On parle de dysmorphophobie lorsque l’image du corps d’une personne n’est pas représentative de l’image réelle. La personne se sent et se voit en surpoids amplifiant le poids qu’elle a par le biais de sensations décalées avec la réalité et par des affects négatifs, voyant plus de graisse qu’il n’y en a vraiment ».

Nous souffrons tous des petites imagecorpsalteréealtérations de notre image du corps. Par exemple, lorsqu’une personne voit un bouton sur son visage, elle ne verra plus que cela et va même avoir une vision amplifiée de celui-ci, persuadée que tout le monde ne verra plus que cela.

Chez la personne souffrant de TCA, l’altération de l’image du corps est beaucoup plus importante que cela. Cette vision altérée de soi peut fluctuer. La psychomotricité intervient en invitant la personne à se reconnecter à ses perceptions. Les expériences corporelles favorisant de nouveaux ressentis, le patient va se forger une image du corps plus en adéquation avec la réalité de son corps.

 

  • Se couper de ses sensations

De même nous pouvons voir que la personne présentant des TCA se coupe généralement de ses sensations et de ses émotions. On peut noter que lorsque la personne essaye de se couper de toutes ses sensations, le corps prend une autre voie pour communiquer : les maladies psychosomatiques (infection urinaire, douleur dans le dos etc.). La psychomotricité propose alors une base d’éprouvés corporels, reconnectant progressivement la personne aux informations que son corps lui amène, amenant ainsi une amélioration globale de l’image du corps.

 

  • Image du corps et affects

Dans les troubles du comportement alimentaire (TCA), on retrouve systématiquement une image du corps très négative, avec des affects négatifs tels que le dégoût, la honte, l’antipathie pour soi etc.

La psychomotricité va alors inviter la personne à se reconnecter à ses éprouvés corporels, lors d’expériences agréables et les associer à des représentations positives, amenant ainsi une amélioration globale de l’image du corps.

 

Elisa Bessellere,

Psychomotricienne à Sos Anor

 

Corps et image du corps

imagesrelation corps_espritDans les Troubles du Comportement Alimentaire, on fait souvent référence à la problématique du corps et de l’image du corps mais de quoi s’agit-il ?

Que représentent le corps propre et l’image du corps ?Comment se construit la perception de son propre corps ? Comment mène-t-elle à la perception de soi, à la conscience de soi ?Quelques réponses en quelques lignes :

 

Quand on parle du corps…

On parle de « corps propre », c’est-à-dire sa propre matière physique mais aussi « ce que je ressens, dans mon corps et à propos de lui », de façon presque double, à la fois un ressenti de l’intérieur et une vision de l’extérieur, de façon quelque peu dissociée…

C’est l’expérience du mouvement du corps dans l’espace qui unifie ce double ressenti… ce depuis l’enfance.

En fait, la première image du corps se forme avec les premiers mouvements …

Dès les premiers mois, l’enfant découvre le monde par le mouvement : ce sont les expériences motrices qui lui Image du corpspermettent d’appréhender son corps, ses possibilités de mouvement, l’espace autour de lui, les objets et l’autre.

C’est ainsi qu’il prend conscience de lui-même, qu’il se forme sa première « image » de lui-même, par la motricité. Ainsi, son « intelligence », son psychisme, se développent par le mouvement c’est pourquoi on qualifie le développement de psychomoteur.

Le tout-petit se regarde avec intérêt, dans le miroir et met plusieurs mois à comprendre que c’est son image, son corps qu’il voit.

Comment passe-t-on des expériences, du vécu corporel (postures, mouvements, sensations…) à l’image du corps ?

« Le vécu corporel appartient au monde de la sensation alors que l‘image du corps appartient au monde de la perception. » P. André – T. Benavidès – F. Giromini

C’est à partir des sensations (des différents canaux sensoriels), du vécu corporel (expériences motrices du tout-petit enfant, enfant puis adulte…) que s’élabore l’image du corps. L’image du corps est faite de ces sensations selon la manière dont elles sont perçues et de la charge émotionnelle et affective associée à ce vécu.

 

Un vécu corporel des expériences motrices La perception du vécu corporel des expériences motrices

Sous le regard de l’autre

Postures

Mouvements

Sensations

Avec des émotions : plaisir, peur…
De différentes manières : sécurisantes, mises en danger…
Avec une charge affective

En relation avec quelqu’un de proche : bienveillant, malveillant

==>> Ainsi, une image de son corps se dessine peu à peu

En effet, mouvement, émotion, relation et image du corps vont de pair.

L’expérience motrice est « toujours liée directement ou non à une expérience émotionnelle, imposée par une relation à autrui. » Michel Bernard

Mouvement, émotion & relation sont étroitement liés.

La construction de l’image du corps, étape de l’image de soi, passe par cette motricité empreinte d’émotion.

Quelques définitions

Un premier niveau de représentation de notre corps est le schéma corporel. On peut le définir comme

– la « cartographie » que nous construisons par les expériences de la forme de notre corps et de nos capacités de mouvement dans l’espace,

– «  l’image tridimensionnelle que chacun a de soi-même qui s’organise grâce aux liens entre la perception et l’action » ( Schilder ).

L’image du corps peut se définir comme «  la façon dont notre corps nous apparaît à nous-mêmes » Schilder

« L’image du corps est l’idée, en perpétuel remaniement, que chacun se fait de son corps ; elle traduit ce que nous percevons à chaque moment et dans la relation aux autres , des qualités de notre corps.

L’image du corps est une représentation imaginaire, et qui reflète à la fois et en même temps le vécu passé le plus lointain aussi bien que l’actuel. « C. Pavot (2008)

Lien avec l’image de soi

L’image du corps peut également être assimilée à la représentation de soi, c’est-à-dire au « corps qui médiatise la relation à l’autre et agit comme le passage entre le dedans et le dehors, entre le Moi et les autres ».M. Guiose / A. Sanglade

Des ouvrages pour aller plus loin

Le corps, Michel Bernard– Le corps par Michel Bernard parcourt l’histoire de ces quelques notions

– L’image inconsciente du corps de F. DoltoL'image incinsciente du corps-Dolto

« L’image du corps est propre à chacun, liée au sujet et à son histoire ; elle est «  la synthèse vivante de nos expériences relationnelles… « .

 

 

Blanche Augarde-Dollé, Psychomotricienne